Regardons comment faire prendre la mesure à l’autre de ce que l’on vit, de ce qui se passe en nous.
Je commence par une anecdote :
On est en visio et un participant dit :
« désolé, il faut que je m’absente, je dois absolument aller nourrir mon chat ! ».
Il est fort probable que certaines personnes réagissent. Qu’elles le verbalisent ou qu’elles le gardent juste en pensée, elles vont probablement (se) dire quelque chose comme « il en a rien à faire de cette réunion » ou « il ne manque pas de toupet de se permettre ça », « ça ne se fait pas », etc.
Peut-être que vous vous retrouvez dans la réaction de la personne qui va nourrir son chat, peut-être que vous vous retrouvez dans les réactions, les interprétations des personnes en face.
Je vous donne un autre exemple qui m’est arrivé récemment :
J’étais en train de faire un point à distance en binôme et la personne avec qui je travaillais me dit :
« Isabelle, je suis désolée, j’aurais besoin d’une minute, j’ai quelque chose de très important à faire.
Je suis mal à l’aise, j’ai besoin de prendre une minute, est-ce que c’est possible ? ».
Naturellement, je me suis dit « bien sûr, il y a quelque chose qui est important pour elle, qui la rend mal à l’aise, il vaut mieux qu’elle prenne une minute et qu’on continue à travailler efficacement ».
Elle a pris cinq minutes et quand elle est revenue, elle m’a dit « Isabelle, en fait j’ai mon chat qui est très malade et je suis inquiète pour lui : ça fait plusieurs jours qu’il ne mange pas et là j’ai senti qu’il avait envie de manger. Je voulais vraiment profiter de cette opportunité, de prendre le temps pour lui donner à manger, merci pour ton soutien ! ».
À ce moment-là, je me suis dit « heureusement qu’elle ne m’a pas dit au moment de partir qu’elle avait besoin de nourrir son chat ». Parce que probablement j’aurai eu les réactions que je vous ai décrites précédemment et non cet élan à la soutenir et à valider sa demande.

Je vous donne un dernier exemple : récemment l’une de mes intervenantes m’a dit « Isabelle, j’ai vécu un évènement difficile ce week-end et cette semaine je ne suis pas très en forme pour mes préparations ». À nouveau, cela m’a permis de la rejoindre, de savoir ce qu’elle vivait. Si elle m’avait décrit l’événement, alors j’aurai probablement analysé à travers mes propres filtres, mes propres représentations, de ce qui est un événement important ou pas, grave ou pas, qui doit impacter le travail ou pas, …
Je vous invite vraiment à prendre conscience que, quand vous racontez concrètement ce qui se passe, alors la personne va l’interpréter, l’analyser par rapport à ses propres représentations qui vont souvent être en décalage avec les vôtres et ce que vous vivez.
Pour que l’autre puisse nous rejoindre dans ce qu’on vit, on va lui partager directement ce qu’on ressent sans nécessairement lui raconter ce qui se passe. Lui raconter qu’on vit quelque chose de douloureux, de difficile, de perturbant, qu’on n’est pas bien, etc. Grâce à cette formulation, au lieu qu’elle branche son mental pour analyser, elle va pouvoir nous rejoindre dans ce qu’on vit, se sentir en connexion, en lien pour pouvoir nous soutenir par rapport à nos besoins.
Quelle que soit votre demande, partagez ce qui se passe en vous, ce que vous ressentez dans votre cœur, dans votre corps. Vous serez sans doute surpris combien cela facilite l’élan vers vous-même, le soutien de l’interlocuteur, la reconnaissance que vous recevrez des autres.