Aujourd’hui, au risque de vous choquer, je vais vous inviter à être vigilant avec la bienveillance. Loin de moi l’idée de vous inciter à être malveillant, bien au contraire ! Mais j’observe qu’on a tendance à mettre un peu à toutes les sauces ce terme à la mode, la bienveillance, et je constate certaines dérives.
Être bienveillant, c’est vouloir le bien de l’autre. Mais en croyant faire du bien à l’autre, on agit souvent en fonction de soi. Et ce qui est bon pour soi n’est pas forcément bon pour l’autre.

Je vous illustre cela avec un exemple, mon exemple. Quand quelque chose ne se passe pas comme je le souhaite dans ma vie, j’ai tendance à vouloir faire changer les choses, à modifier ma posture, à évoluer et à progresser afin que les choses ne restent pas telles qu’elles sont. Du coup, j’ai également tendance à vouloir faire la même chose pour les autres : j’ai tendance à vouloir leur donner des conseils, même s’ils ne me les ont pas demandés, parfois je vais même pointer des dysfonctionnements pour les aider à s’améliorer. Cela part d’un élan qui se veut bienveillant, sauf qu’en face, ce n’est pas du tout reçu comme de la bienveillance. « Mais de quoi elle se mêle, celle-là ? Qu’est-ce qu’elle raconte ? Mais je ne lui ai rien demandé ! » Aujourd’hui, j’essaie de me centrer sur la demande de l’autre, et parfois de me taire s’il n’y a pas de demande.
Concrètement, en formation, lorsqu’un participant partage une situation difficile pour lui, alors qu’auparavant j’aurai eu tendance à donner des conseils, aujourd’hui je lui demande : « est-ce simplement un partage que vous avez fait au groupe, ou souhaitez-vous que nous cherchions ensemble des solutions ? ». Je suis régulièrement surprise lorsque quelqu’un dit : « C’était juste un partage. » Être bienveillant avec cette personne à ce moment-là, c’est simplement lui offrir un espace bienveillant d’accueil où elle pourra déposer ce qui la pèse, afin de repartir plus légère. Ma bienveillance consiste à lui apporter une réponse en fonction de son intention et non par rapport à mon mode de fonctionnement.
La proposition que je vous fais donc n’est plus d’être bienveillant, c’est-à-dire centré sur moi-même (« JE suis bienveillant »), mais au contraire de vous centrer sur l’autre, de regarder ce qui se passe chez l’autre. En vous centrant sur l’autre, vous allez identifier ce qui est bon pour lui, soit intuitivement, soit avec de petits indices à travers ce qu’il dit, soit tout simplement en lui demandant : « Et qu’attends-tu de moi par rapport à cela ? » En faisant cela, vous vous assurez d’être dans une vraie bienveillance par rapport à ce qui est bon et bien pour l’autre, selon lui.